Au centre des femmes marocaines Al-Hasaniya, basé à Londres et oeuvrant dans le cadre de l’assistance aux femmes, le nombre de cas de violence conjugale signalés et recensés a augmenté de 100% depuis le début de l’épidémie. La majorité de ces femmes sont de nouvelles arrivées dans le pays.
«La Covid-19 a changé notre façon de travailler et la nouvelle norme est un défi à relever», déclarent les responsables du Centre Al-Hasaniya à Londres. Les violences conjugales constatées au cours de la pandémie, dont le nombre a explosé, représentent une problématique de taille pointée par les responsables du centre. « Entre mars 2019 et septembre 2019, nous avons traité plus de 50 cas de violences domestiques graves. Plus de 70% des demandes d’assistance adressées au Centre étaient des femmes marocaines. À la même période en 2020, nous avons assisté à une augmentation fulgurante de près de 100% portant le nombre total depuis la pandémie à 104 cas dont plus de 80 sont d’origine marocaine », indique-t-on.
Souad Talsi, membre fondateur et actif du Centre Al-Hasaniya, insiste sur la nécessité de venir en aide à ces femmes et de leur donner les moyens de s’intégrer au sein de la société anglaise où elles sont arrivées, pour la plupart, dans le cadre de mariages avec des conjoints installés en Angleterre.
« Ces femmes marocaines ne viennent pas de la communauté déjà installée en Angleterre mais sont fraîchement arrivées dans le pays dont 99% avec un visa de conjoint. Cela signifie qu’elles n’ont aucun recours aux fonds publics et restent entièrement dépendantes du mari pour survivre». Nombre d’entre elles ont épousé des britanniques musulmans d’origine pakistanaise qu’elles ont rencontré via les réseaux sociaux ou au Maroc, lors de vacances estivales. «Malheureusement, l’expérience que nous avons dans le centre est que trop souvent ces mariages finissent par être rompus et les femmes subissent d’innombrables violences sous toutes ses formes», explique Souad Talsi.
« N’ayant aucun recours au public, beaucoup ont du mal à appeler la police et ont trop peur de parler de leur sort à qui que ce soit, craignant des représailles ou même l’expulsion».Le Centre intervient soit directement lorsque la femme s’y adresse soit par le biais de la police qui le contacte pour intervenir auprès des femmes de la communauté marocaine.
« Il ne s’agit peut-être que de la partie visible de l’iceberg, car nous ne connaissons tout simplement pas le nombre réel de ceux qui ne sont peut-être pas heureux dans leur mariage et qui sont peut-être victimes de violence. Notre action se limite à intervenir auprès de ceux qui se trouvent dans les zones immédiates de Londres, à partir desquelles nous opérons ». Elargir ce type d’intervention à l’ensemble du pays est donc une des priorités du Centre Al Hasaniya mais les moyens font défaut pour le moment. Un appel est d’ailleurs lancé dans ce sens afin de doter le centre de plus de moyens pour intervenir auprès des femmes d’origine marocaine. Cela ne l’empêche pas de venir en aide à des femmes venues d’autres villes comme Manchester ou Liverpool mais «les autorités marocaines chargées de soutenir la diaspora marocaine ont un devoir de diligence envers ces femmes et nous espérons que notre travail sera reconnu et financé», conclut Talsi.
Leila Amiri