CNEW, ses Journalistes, ses Noires et ses Arabes.
Diversité sous contrôle : quand être vu chez Bolloré impose de parler d’une seule voix.

Autour de Bolloré, un empire médiatique s’est bâti sur une ligne idéologique marquée, où Cnews joue un rôle central. Certains journalistes issus de la diversité y trouvent une place, souvent conditionnée à leur adhésion au discours dominant. Une visibilité qui interroge sur le prix de la loyauté.
En France, les milliardaires ont fait main basse sur les médias. Patrick Drahi, Vincent Bolloré, Xavier Niel, Bernard Arnault, Daniel Kretinsky, Rodolphe Saadé. En dehors de Pierre-Edouard Stérin qui veut s’incruster dans cet univers, c’est Vincent Bolloré, devenu Tycoon parmi les magnats, qui a poussé le plus loin le bouchon. Il a « bollorisé » le groupe Canal plus, la radio Europe 1 et les journaux en sa possession dont Le Journal du dimanche, le plus idéologiquement affirmé. Et Bolloré est bien décidé, à l’instar d’Elon Musk, d’être le futur faiseur de roi des prochaines élections présidentielles françaises, après avoir piteusement misé sur Éric Zemmour en 2022.
Les quatre I : Islam, Immigration, Insécurité, Israël
Dans le groupe de Bolloré, Cnews est devenue le navire amiral de la reinformation qui effleure le conspirationnisme. Dans les mêmes locaux, il y a la frégate Europe 1, autrefois radio parmi les plus singulières et des plus anticonformistes. Elle navigue désormais dans le même sens. Le JDD, idéologiquement pris en main par Geoffroy Le Jeune, rassemble, en fin de semaine, les mêmes plumes du groupe. Bolloré a congloméré, dans un même nid, tout ce que la France compte comme conservateurs au service de la pensée d’extrême-droite. Géré avec de considérables économies de moyens (peu de reportages, peu de correspondants, peu d’envoyés spéciaux, peu d’informations, peu de faits et toujours les mêmes, beaucoup de mise en scène, d’opinion et de blablas…), le groupe, dans un mélange de fordisme journalistique et de stakhanovisme rentable, use les journalistes jusqu’à la corde. Enrégimentés dans ce qu’il faut bien appeler une croisade, ces derniers sont, comme illuminés, au service d’une mission salvatrice et restauratrice de la France d’antan. Avec la liberté d’expression en bandoulières, la camarilla de Bolloré, comme assiégée dans un entre-soi paranoïaque, a décidé, tels les cavaliers de l’apocalypse, d’en finir avec les trois grand « I » : Islam, Immigration, Insécurité. A quoi, il faudra ajouter, depuis le 7 octobre 2023, le « I » d’Israël.
Vol au-dessus d’un nid de réac.
Zemmour parti de Cnews, Pascal Praud en est devenu la figure proéminente de la chaine et même du groupe. Grand dilettante et spécialiste de la feinte, Praud, comme pris par l’hubris, n’obéit plus à aucune règle si ce n’est les injonctions de Serge Nedjar, grand manitou et vraie maréchaussée de la sémantique. Celui-ci tire les vraies ficelles, les grosses comme les petites. Il décide de tout. Ce qui doit être dit ou pas. Praud est bien payé, avec un chèque de 7 chiffres, ce qui est un argument de poids. Dans un mélange générationnel, soigneusement élaboré, il s’est entouré par d’incontournables figures de la pensée droitière mais aussi par des obligés. A côté des surannées, Véronique Jacquier et Gabrielle Cluzet, il y a les nouvelles pousses de la rive « Catho tradi » comme Charlotte d’Ornellas ou Eugène Bastié. Deux femmes, avec un joli minois, un cerveau bien fait, servi par un intrépide messianisme. Il y a Nathan Devers, jeune philosophe, caution de gauche, qui, dans ce cénacle, semble égaré. Incontournable, Geoffroy Lejeune est chez lui à tous les étages. Un peu timide sur le bord, il peut rougir au moindre compliment. La gentillesse de son visage poupin est trompeuse. Il est, en plus d’être coriace, le vrai idéologue de la bande. Côté vieux, il y a à côté de Georges Fenech ou Philippe Bilger, tous les deux au bord de l’épuisement, Gilles-William Goldnadel, le plus acariâtre et le plus tempétueux. Il a son rond de serviette sur le plateau du soir. Nervis des prétoires et grand idolâtre de Benyamin Netanyahou, il s’est fait une spécialiste de pourfendre, « le privilège rouge », France Inter, la télévision publique et le Journal le Monde. Enfin, il y a l’impayable Élisabeth Lévy, l’hystérique des plateaux.
Autre programme, si on fait l’impasse sur la flétrissure Jean-Marc Morandini, il y a celui de Michel Onfray, philosophe défroqué avec une Laurence Ferrari qui se complait, avec perfidie, à lui sévir les plats. Celui de Philippe de Villiers, cette autre fabrique de l’altérophobie. Autrefois mentor de Bruno Retailleau, il assiste, dépité, à la percée de son ancien poulain, l’actuel ministre de l’Intérieur. Il y a le maurrassien Mathieu Bock-Côté. Celui-ci a émigré du Canada, avec armes conceptuelles et bagages intellectuels. Puissant polémiste, il a fallu débaucher un immigré pour remplacer Zemmour. Depuis, il vaporise Paris avec le recyclage de ses idées identitaires frappées du sceau du souverainisme canadien Il y a enfin, ici et là, la banqueroute morale et intellectuelle incarnée par la personne d’Éric Naulleau.
Et puis, il y a les nouveaux rejetons. Ils sont si désinhibés au point qu’aucune ordure malodorante ne puisse les rebuter, ils ont les crocs acérés. Ils sont pressés. Et ils ont faim : Gauthier Le Bret, le plus retors d’entre eux. Yoann Usaï qui suinte la malveillance. Eliot Deval qui prend un malin plaisir à être sarcastique ou Erik Tegnér, l’homme sans surmoi. Leurs références, ce n’est certainement pas Albert Londres. C’est plutôt La France, orange mécanique de Laurent Obertone ou le Site Fdesouche de Pierre Sautarel.
Avec ces cliques, l’extrême droite est chez elle. Elle joue à domicile. Et à la limite, on peut parfaitement admettre que les charbonniers soient maitres chez eux. Seulement, il y a tous les autres : les paillassons alibi
Les Noires et les Arabes de Bolloré
Dans son œuvre, l’0rientalisme, Edward Saïd a portraituré le « savant oriental », ce perroquet qui fredonne les clichés Occidentaux. En 1962, dans Peaux noires, masques blancs, Frantz Fanon, signalait combien « l’intellectuel colonisé » dévore avec avidité « la culture du colon ». « Il ne se contentera pas » dira-il, « de connaître Rabelais ou Diderot, Shakespeare ». Il doit montrer patte blanche. Mais c’est peut-être Malcolm X qui, en 1963, a fait la plus cruelle des distinctions entre « les houses negroes » et « les field negroes », les « Nègres de domicile » et les « nègres des champs ». Tous les trois auteurs n’ont pas prévu les mutations migratoires en Europe. Mais leurs regards demeurent cependant d’actualité.
Tout laisse penser que l’écosystème de Bolloré choisit soigneusement sa propre diversité. Les Noirs et les Arabes, outre de remplir une fonction d’alibi, sont promus du moment qu’ils s’alignent servilement dans la doxa maison. Dans le prorata black, noir ou caraïbéen, Christine Kelly à une place de choix. Elle trône sur un quarteron de mousquetaires dont l’antédiluvien Marc Menant. Elle est l’illustration la plus aboutie de la « house négroes ». De sa négritude, elle joue imparablement comme d’un atout ou d’un diplôme. Arborant une gentillesse factice, celle-ci est destinée à masquer son impéritie. Ancienne du CSA, rebaptisée ARCOM, elle a, avec son sourire d’hôtesse de l’air et son oreillette pour recevoir les consignes, la compassion sélective et une propension à s’aplatir devant les toubabs : Jordan Bardella, Marine Le Pen, Zemmour son « Ericou » ou Sarah Knafo, sa « chérie ». Autre cas sur lequel il Inutile de s’attarder, c’est l’inénarrable Rachel Khan. Venue, comme Céline Pina, du Printemps républicain crée par Laurent Bouvier, elle est, à elle toute seule, un chef d’œuvre de mauvaise foi.
Les Arabes sont, eux, un peu plus nombreux. Franco marocains ou algériens, enfants de l’immigration, ils proviennent pour la plupart de la gauche, le parti socialiste en particulier. Anciens militants ou animateurs sociaux, Ils n’ont pas la reconnaissance du ventre. Ils furent nourris par la politique de la ville dont ils sont devenus les profondeurs attitrées. Le Printemps républicain, encore lui, nous a légué un morceau de choix, le franco-marocain Amine El Khatmi.
Les Franco marocains de Cnwes.
Seul le vent peut emporter une girouette. Et la versatilité chez Amine est une seconde nature. Né l’année de la réélection de Mitterrand. il s’est engagé jeune chez les socialistes, au lendemain 21 avril 2002 pour participer au combat contre le FN. Depuis, Amine El-Khatmi enchaine les fidélités et surtout les infidélités : petite main chez Ségolène Royal, membre du conseil national du Parti socialiste (PS), rallié un temps aux écologistes, il est, en 2022, un soutien d’Emmanuel Macron. Dans le deal avec ce dernier, des circonscriptions gagnables pour lui et Zineb El Rhazoui. Promesse non tenue par Macron, Amine en sort meurtri et ivre de vengeance. Fielleux, il vocifère depuis, par écrit et sur les plateaux télé. Zineb, l’ancienne égérie de tous les identitaires, s’est exilée à Dubaï et défend désormais le Hamas. Amine a muté. Il est devenu patriotard et l’un des plus zélés thuriféraires, non pas d’Israël, mais du sionisme le plus outrancier.
Autres marocaines, il y a l’avocate Najwa El Haïti ou la fringante Naima El Mfadel . Des anciennes connaissances sur lesquelles, par charité, je tairai tout mot blessant. Ce qui ne m’empêche pas d’être peiné par leurs naufrages pathétiques. Elles semblent ignorer « qu’être dans le vent, c’est le sort d’une feuille morte ». De son côté, Karima Brikh a aussi des origines marocaines. Elle est d’abord la femme de…. Elle est venue dans les bagages de Mathieux Bocke-côté, son mari. Elle parle de la France avec un accent québécois, ce qui est tout de même cocasse. Sur le fond, c’est plus du Maurras que du Renan. Denier venu, c’est le prolifique Driss Ghali qualifié de Zemmour marocain par la revue Jeune Afrique. C’est dire. Et cela suffit pour le situer.
Les Franco algériens de Cnews
Il y a l’autre Amine. El Bahi de son nom. Il parle avec majesté et une désarmante suffisance. Il entend sauver la France de l’islamisme, lui dont la sœur ainée avait rejoint, en 2014, les rangs de DAECH. Comme Boualem Sensal, il est dans le « comité stratégique » de Frontières qui se veut le Médiapart de l’extrême-droite. Il y a, par ailleurs, Sabrina Medjeuber. Un cas pathologique. Elle adore le langage sophistiqué et parle comme un dictionnaire pour impressionner le chaland. Adepte du « il n’y a qu’a » et du « il faut qu’on », elle impressionne le plateau avec ses saillies du style « la fracture anthropologique » qui plombe « Sa France ».
La Franco-tunisienne de Cnews et d’Europe 1.
Avec Sonia Mabrouk, c’est le pompon. Vraie journaliste, douée, elle est comme engoncée dans des sables mouvants dont elle peine à sortir. Au lieu de rester professionnel comme Darius Rochebin, le Suisse d’origine iranienne, Léa Salamé, la libanaise, Salhia Brakhlia ou Mohamed Bouhafsi, aux parents algériens, Karim Rissouli, le franco-marocain, Sonia Mabrouk a préféré noyer son métier, son talent et son honneur dans un journalisme de propagande.
On peut parfaitement être de gauche, de droite, comme c’est le cas pour Othman Nasrou et même d’extrême-droite, pourquoi pas. L’essentiel, c’est de ne pas se vendre. Car l’histoire ne réserve qu’une poubelle pour les vendus.
Par Driss Ajbali