Entretien

Journée scientifique : Le Ministère des MRE rend hommage a Abdelhamid Benazzouz

C’est ce mercredi 14 novembre que se tient à Rabat, à l’initiative de Abdelkrim Benoutique ministre en charge des MRE et des affaires de la Migration, une journée scientifique en l’honneur de deux experts franco-marocains, le Dr Abdelhamid Benazzouz et Dr Rabia Bouali-Benazzouz, et ce pour leur contribution effective dans les domaines de la recherche scientifique et de la Santé en France et au Maroc. Nous avons rencontré Abdelhamid Benazzouz, actuellement directeur de recherche d’une équipe au sein de l’Institut des maladies neurodégénératives à l’Université de Bordeaux. Entretien.

 

Bled.ma : Pouvez-vous, brièvement, nous expliquer les découvertes réalisées par votre équipe concernant Parkinson?

. Abdelhamid Benazzouz : Mon équipe durant ma thèse de Doctorat en Neurosciences, j’ai mis au point une nouvelle approche thérapeutique neurochirurgicale de la maladie de Parkinson chez le singe modèle de la maladie à l’Université de Bordeaux au sein d’un Laboratoire rattaché à l’Institut National de la Recherche Scientifique (CNRS). Il s’agit de la Stimulation Cérébrale Profonde qui consiste à stimuler électriquement un petit noyau du cerveau appelé le Noyau southalamique. Au vu des effets bénéfiques spectaculaires sur les symptômes de la maladie obtenus chez l’animal, j’ai proposé et participé au transfert de cette chirurgie, au Centre Hospitalier Universitaire de Grenoble, aux patients parkinsoniens sévèrement atteints. Le bénéfice a été tel, que les patients ont repris leurs activités professionnelles avec une autonomie dans la vie de tous les jours. Contrairement aux traitements médicamenteux qui présentent des fluctuations à long terme, l’efficacité de cette approche neurochirurgicale reste quant à elle stable.

. Au Maroc, quel est l’état des lieux de la maladie?

. Au Maroc, la maladie de Parkinson est présente comme dans tous les autres pays avec 1 à 2% des individus qui développent les symptômes à l’âge de 60 à 65 ans. Au Maroc, comme les autres pays d’Afrique du nord, une forme génétique particulière est plus fréquente par rapport aux pays occidentaux.

. Dans le cadre du transfert des compétences de l’étranger, y a-t-il des échanges entre l’Université de Bordeaux où vous exercez et une université au Maroc?

. Il existe plusieurs échanges entre l’Université de Bordeaux et les Universités Marocaines, en particulier dans le cadre des Masters internationaux de Droit, de Pharmacie et de Neurosciences. Ma collaboration avec le Maroc a démarré dans les années 2000, d’abord avec les CHU et ensuite avec les Universités.En 2008, j’ai été co-fondateur d’un Groupement de Recherche International Franco-Marocain de Neuroscience (GDRI-Neuro) qui a rassemblé 27 équipes marocaines et 13 françaises. Ce GDRI a permis de démarrer des collaborations scientifiques entre des équipes françaises et marocaines. Dans ce cadre, une vingtaine d’étudiants marocains ont développé leurs travaux de recherche dans des laboratoires français qui leur ont permis de soutenir leurs thèses pour l’obtention du diplôme de Doctorat.

Dans le cadre d’une convention entre l’Inserm et l’Académie Tanger/Tétouan/Al Houceima nous avons créé, mon épouse Rabia Bouali-Benazzouz et moi même, un réseau Inserm-Jeunes, le seul qui existe en Afrique. Ce réseau a pour objectif de sensibiliser les jeunes lycéens aux avancées de la recherche dans le domaine des Neurosciences et à la démarche scientifique.

. Vous avez réalisé la première chirurgie Parkinson au Maroc. Pouvez-vous nous en dire plus?

. Ma collaboration avec le Maroc a démarré dans les années 2000, d’abord avec les CHU et ensuite avec les Universités. Le 10 Septembre 2007, nous avons réalisé la première chirurgie Parkinson dans le Service de Neurochirurgie à l’hôpital Ibn Rochd de Casablanca. Ensuite j’ai participé au démarrage de cette chirurgie à l’hôpital des Spécialités et au CHU de Rabat, au CHU de Fès et plus récemment au CHU de Marrakech. Actuellement une centaine de patients marocains bénéficie de la stimulation cérébrale profonde au Maroc.

. Vous travaillez dans le même domaine votre épouse et vous même ?

. Avec mon épouse nous avons eu un parcours similaire depuis l’université à Tétouan au Maroc jusqu’à aujourd’hui. Elle est aussi neuroscientifique, elle travaille sur la douleur pathologique dans l’Institut Interdisciplinaire des Neurosciences à l’Université de Bordeaux. Comme la maladie de Parkinson est caractérisée aussi par la manifestation de douleurs chroniques chez les patients, nous collaborons ensemble pour mieux comprendre cette douleur dans le cadre de cette maladie afin de trouver un traitement efficace.

. Parlons de vos passions. Vous jouez de la guitare ? Des regrets par rapport à la musique? Travailler en tandem, un plaisir au quotidien?

. C’est vrai que j’ai une grande passion pour la musique et la guitare en particulier. A l’obtention du baccalauréat et le premier Prix de guitare la même année, il fallait faire un choix entre les études universitaires en musicologie ou en science. Je n’ai aucun regret dans ma décision à part le manque de temps pour profiter à fond de ma guitare.

. Vous avez obtenu plusieurs prix à l’international. Aujourd’hui, c’est le Ministère, au Maroc, qui vous rend hommage. C’est une consécration importante pour vous?   Que représente pour vous cet hommage dans votre pays d’origine?

. J’ai été lauréat du prix de l’Académie française de médecine en 2003 et de l’Académie des sciences en 2007, ainsi que du prix de l’excellence scientifique de l’Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale (Inserm). Ceci est une belle reconnaissance de mon pays d’adoption, la France.

Aujourd’hui c’est le Ministère chargé des Marocains Résidant l’ Etranger, en la personne de Monsieur le Ministre Abdelkrim Benatiq, qui veut honorer ainsi les compétences des résidents marocains qui habitent à l’étranger. Cet hommage, pour mon épouse et moi même, nous rend encore fiers de notre pays. Ce geste nous comble et nous fait énormément plaisir. C’est une reconnaissance pour nous, pour nos travaux de recherche et aussi pour notre implication et engagement au Maroc.

Nous tenons à remercier chaleureusement Monsieur Benatiq pour cette initiative ainsi que toute son équipe pour l’organisation de cet évènement scientifique. C’est une belle occasion pour échanger et partager les connaissances actuelles dans le domaine de la maladie de Parkinson avec nos collègues scientifiques et médecins de France et du Maroc.

 

Parcours de Abdelhamid Benazzouz

 Abdelhamid Benazzouz est directeur de recherche et dirige une équipe au sein de l’institut des maladies neurodégénératives à l’Université de Bordeaux. Il est expert dans le domaine des neurosciences, spécialisé dans la maladie de Parkinson. Après l’obtention d’une Licence au Maroc, il est parti à Bordeaux pour préparer son doctorat en Neuroscience et Pharmacologie. En parallèle avec son activité de recherche, depuis 2012 il est membre du Comité National du CNRS, autorité chargée des recrutements des chercheurs et de l’évaluation des laboratoires de recherche.

Propos recueillis par / Amale DAOUD

 

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