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Réforme du Code de la Famille: Le Moroccan Women Leaders Network exprime sa position

Certaines propositions de réforme impacteraient directement les femmes MRE. Le Réseau MWLN les a analysées.

Le Moroccan Women Leaders Network vient de publier sa position relative aux propositions de réforme du Code de la Famille. Dans un communiqué, le Réseau analyse les différentes propositions et, entre autres, celles impactant directement les femmes d’origine marocaine qui vivent à l’étranger. Tout en se félicitant de certains dispositions, il ne manque pas de pointer du doigt celles qui restent en-de-ça des attentes. 

Des avancées mais encore du chemin à parcourir en matière d’égalité hommes-femmes. C’est ainsi que le Morocco Women Leader Network (MWLN), réseau lancé en mai 2024 destiné à connecter les femmes marocaines, qu’elles soient au Maroc ou à l’étranger, et réfléchir autour de problématiques féminines majeures, qualifie, dans leur globalité, les propositions de réforme du code de la famille marocain.

“Le Maroc, à travers sa proposition de réforme du Code de la famille, se trouve à un tournant crucial dans la lutte pour l’égalité des droits entre les hommes et les femmes. Si certaines dispositions du projet reflètent une volonté de progrès, il reste encore de nombreuses lacunes pour que le cadre juridique national s’aligne entièrement sur les engagements internationaux, notamment la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDEF) ratifiée le 21 juin 1991 par le Maroc. Ce contexte rend d’autant plus pertinent l’examen des propositions à la lumière des principes de ce traité, ainsi que des dernières recommandations formulées par le Comité CEDEF à l’égard du Maroc”, peut-on lire dans le communiqué.

Il ajoute que ces dispositions du Code de la famille marocain ne concernent pas seulement les femmes vivant au Maroc. “Elles ont également des répercussions significatives pour les Marocaines résidant à l’étranger. Dans de nombreux pays, les femmes d’origine marocaine restent assujetties à la législation marocaine en matière de statut personnel, notamment pour des questions telles que le mariage, le divorce ou l’héritage. Cette situation met en lumière l’urgence et l’importance d’une réforme ambitieuse capable de garantir les droits fondamentaux de toutes les femmes concernées, indépendamment de leur lieu de résidence”, ajoute le communiqué.

Le MWLN estime que les réformes proposées concernant la gestion du divorce “marquent une avancée notable pour les droits des femmes marocaines. Celles-ci peuvent désormais être les tutrices légales de leurs enfants et conserver leur garde même en cas de remariage, supprimant ainsi une disposition discriminatoire de l’article 175 du Code de la Famille. Cette mesure met fin à la prédominance systématique des pères dans ce domaine et permet aux mères d’accomplir les actes juridiques nécessaires au bien-être de leurs enfants sans nécessiter l’approbation de leur ex-conjoint”.

“En outre, un allègement des procédures administratives est prévu pour les Marocains Résidant à l’Étranger (MRE), leur permettant de contracter leur mariage sans la présence obligatoire de deux témoins musulmans, comme cela est le cas dans la législation actuelle”, précise la même source.

Un bémol toutefois avec la persistance d’exceptions à l’âge minimum légal du mariage, autorisant l’union à 17 ans sous certaines conditions, reste une source de préoccupation. “Cette disposition, en contradiction avec les recommandations du Comité CEDEF, continue d’exposer les jeunes filles à des dangers multiples, perpétuant des inégalités structurelles et des risques tant économiques que psychologiques””.

Pour les femmes marocaines résidant à l’étranger, notamment dans les pays européens, où en général l’âge minimum légal du mariage est strictement fixé à 18 ans, la persistance des exceptions à l’âge minimum légal du mariage dans le Code de la Famille marocain a un impact significatif. Le maintien d’exceptions dans le Code marocain expose les jeunes filles à des situations où leur mariage, bien que légal au Maroc, ne serait pas reconnu dans leur pays de résidence.  Cette disposition du Code marocain constitue une barrière supplémentaire à l’émancipation des jeunes filles marocaines de la diaspora.

Polygamie et silence sur les mères célibataires : des réformes incomplètes

En matière de polygamie, la réforme tente de limiter sa pratique à des cas « objectivement exceptionnels » et propose d’introduire des clauses contractuelles permettant aux femmes de la refuser. Bien que ces ajustements représentent une tentative d’encadrement, ils demeurent insuffisants face à la demande d’abolition totale émise par le Comité CEDEF.

Le maintien de la polygamie dans le Code de la Famille marocain exacerbe les défis juridiques, sociaux et économiques auxquels sont confrontées les femmes marocaines vivant à l’étranger. Interdite et non reconnue juridiquement dans la plupart des pays européens, la polygamie expose ces femmes à des conflits de lois. Elles peuvent ainsi se retrouver dans des unions non reconnues légalement, ce qui limite leurs droits en matière de protection sociale, d’héritage ou encore de pension alimentaire en cas de divorce. Par ailleurs, cette disposition du droit marocain renforce les dynamiques patriarcales au sein des communautés migrantes, maintenant les femmes dans des positions de subordination vis-à-vis de leurs maris, même en contexte européen.

Par ailleurs, le texte reste muet sur les droits des mères célibataires et de leurs enfants, une lacune grave dans le contexte actuel. Ces femmes, confrontées à une stigmatisation sociale et à des poursuites légales, continuent de subir une marginalisation multiple. Le Comité CEDEF insiste sur la nécessité de leur garantir une protection explicite contre les discriminations et de reconnaître leurs droits, ainsi que ceux de leurs enfants, pour lutter contre cette double injustice.

Droits économiques et héritage : des avancées encore timides

La reconnaissance de la contribution économique des femmes à la valorisation des biens acquis pendant le mariage représente une avancée importante. Toutefois, elle reste insuffisante au regard des exigences de l’article 16 de la Convention CEDEF, qui préconise un partage égal des biens à la dissolution du mariage. Une réforme plus ambitieuse est nécessaire pour garantir que les femmes ne soient pas laissées dans une situation de précarité après une séparation, quel que soit leur statut économique durant l’union.

Concernant la question de l’héritage, les autorités ont proposé une alternative : la possibilité de donations sans limitation aux héritières, y compris mineures. Cette pratique permet une transmission différée des biens jusqu’au décès du donateur. Le MWLN se réjouit de voir que dorénavant la question de l’héritage fait partie du débat public, ce qui témoigne d’une évolution des mentalités.

Il convient également de saluer la disposition qui protège le conjoint survivant, en particulier l’épouse, en excluant le domicile conjugal de l’héritage. Cette mesure vise à garantir un droit au logement et à protéger les femmes en cas de décès de leur conjoint.

Pour ce qui est des Marocaines Résidants à l’étranger, le MWLN rappelle qu’elles sont directement impactées par l’inégalité entre les hommes et les femmes en héritage car en Europe notamment, les lois nationales consacrent cette égalité entre les hommes et les femmes. Cette divergence entre les systèmes juridiques crée des tensions lors de la répartition des biens qui peut se traduire par un accès restreint aux ressources familiales, ce qui compromet leur indépendance financière. Elle peut également engendrer des litiges familiaux complexes, particulièrement lorsque certains membres de la famille invoquent la loi marocaine pour contester les droits des héritières.

Une réforme à approfondir et à concrétiser

Le projet de réforme du Code de la famille marocain témoigne d’une prise de conscience des enjeux liés à l’égalité des droits, mais pour le MWLN, il demeure en deçà des attentes et des recommandations les plus récentes du Comité CEDEF. Pour opérer un changement structurel véritable, il est essentiel d’éliminer toutes les dispositions discriminatoires et de garantir une consultation inclusive et approfondie avec les organisations de femmes et la société civile.

Cette démarche est d’autant plus cruciale que les discriminations persistantes du Code de la famille continuent d’affecter également la vie des Marocaines résidant à l’étranger. Ces femmes, malgré leur présence dans des pays où les lois locales consacrent l’égalité de droits, restent soumises à des règles qui les désavantagent dans des domaines aussi fondamentaux que le mariage, le divorce et l’héritage. Cette situation souligne l’urgence d’adopter des mesures conformes aux normes internationales,

Pour le MWLN, une réforme ambitieuse du Code de la famille constituerait un pas décisif vers le respect des engagements internationaux du Marocafin d’assurer à toutes les femmes marocaines, où qu’elles se trouvent, une égalité effective de droits et une protection contre les discriminations. Elle jetterait ainsi les bases d’une société marocaine plus égalitaire, inclusive et juste, en garantissant les mêmes droits et opportunités à toutes les femmes.

 

 

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