
Forte d’une communauté de plus de cinq millions de personnes, la diaspora marocaine peut aussi être un important levier de développement économique du Maroc, son pays d’origine. Alors que les transferts placent le Maroc dans le top ten mondial des envois de fonds de l’étranger vers le pays d’origine, les investissements restent bien-en-de-ça des possibilités offertes. Des dispositifs sont mis en place pour hisser leur niveau.
« Nous avons également à cœur d’ouvrir de nouvelles perspectives aux membres de la Communauté qui sont désireux d’investir dans leur pays. En effet, il est inconcevable que leur contribution au volume des investissements nationaux privés se limite à 10% » (extrait du discours royal du 6 novembre 2024).
Jamais l’investissement des Marocains du Monde (MDM) et leur implication dans le développement économique n’aura atteint un tel intérêt au Maroc. Sa Majesté a appelé les institutions en charge de la communauté marocaine à l’étranger à réfléchir pour une mise en œuvre à des mécanismes qui assureraient une hausse des investissements des MDM au Maroc. Car ces derniers restent bien-en-de-çà du niveau souhaité et surtout sans aucune mesure avec l’attachement dont font preuve les MDM pour leur pays d’origine.
Impliquer les MDM dans le développement du Maroc
Le discours du 6 novembre n’était pas le premier à évoquer ce phénomène. Dans son discours en date du 20 août 2022, le souverain avait également appelé à la dynamisation des investissements de la diaspora marocaine. La Charte de l’Investissement a concrétisé cet appel en prévoyant des mécanismes d’encouragement. Le système financier a suivi. Tamwilcom, ex-Caisse Centrale de Garantie, a aussi emboîté le pas en mettant sur le marché un produit exclusivement destiné à l’investissement des MDM. L’éco-système des startups est loin d’être en reste. Les MDM représentent une cible importante et le Maroc entend oeuvrer pour qu’une partie des transferts, qui ont culminé à plus de 100 milliards de dirhams fin 2023, soit orientée vers l’investissement productif.
« Créer de la richesse, de l’emploi et participer au grand programme d’investissement lancé par le Maroc » : s’exprimant au lendemain de l’adoption par la chambre des représentants de la nouvelle charte de l’investissement, Mohcine Jazouli, ministre délégué en charge de l’investissement, a ainsi résumé les trois objectifs majeurs que s’assigne le Maroc en optant pour une nouveau cadre législatif propre aux investissements. La nouvelle charte de l’investissement est un texte fondamental pour le pays. Au-de-là des aspects techniques qu’elle détaille, et qui sont par ailleurs importants dans tout acte d’entrepreneur, elle symbolise et matérialise une volonté politique portée par les hautes instances du pays de faire du Maroc un état moderne ouvert sur l’investissement extérieur.
La charte de l’investissement, le gage majeur d’un environnement propice
Les nombreux grands chantiers lancés se devaient de disposer d’un cadre approprié et incitatif. Les Marocains du Monde ont disposé, dans ce nouveau texte, d’une attention particulière. La charte de l’investissement ne pouvait pas passer outre. Cette charte a pour objectif majeur d’inverser la donne en termes d’investissements. En d’autres termes, faire en sorte que le secteur privé contribue davantage au niveau de l’investissement au Maroc. Le secteur privé ne contribuait en effet qu’à un tiers des grands projets, les deux tiers restants étant financés par le secteur public. Le Maroc souhaite que cette tendance globale change au profit du privé. Et les MDM en sont une partie. Depuis son entrée en vigueur en 2024, la nouvelle Charte de l’investissement s’est imposée comme un instrument clé pour relancer l’attractivité économique du Maroc. Conçue pour stimuler les investissements nationaux et étrangers, elle vise à renforcer l’équité territoriale, favoriser la création d’emplois et diversifier les secteurs porteurs. En une année, les premiers indicateurs sont encourageants : hausse du nombre de projets validés, augmentation des capitaux engagés et consolidation de la position du Maroc comme hub régional.
Garanties, banques.. les mécanismes mis en place
Bon an mal an, les pouvoirs publics déploient une armada de mécanismes pour faire en sorte que cette communauté trouve dans son pays d’origine les ingrédients nécessaires pour sauter le pas. Aujourd’hui si les transferts explosent, dépassant les 115 milliards de dirhams, les investissements ne représentent que 10% de ce montant. Et encore ! On estime qu’à peine 2% sont orientés vers des secteurs productifs, l’essentiel étant destiné à des achats immobiliers. Pourtant, la volonté semble être là. A en croire les déclarations multiples de membres de la communauté marocaine établie à l’étranger, le Maroc est un pays qui avance et qui présente des signes très encourageants de développement. Bien entendu, le Mondial 2030 est là avec son lot de projets structurants et de dynamique de développement. Mais ce n’est pas tout. La crise économique dans la majorité des pays d’accueil et les discriminations qui en découlent, créant un climat délétère, sont ne faveur d’un retour vers le Maroc, du moins d’un intérêt croissant pour sauter le pas. Le retour est évoqué. Reste à en faire une réalité.
Certains ont sauté le pas. C’est le cas d’Ahmed Chekairi, un médecin d’origine marocaine ayant exercé de longues années à Londres. L’appel du pays s’est fait pressant et, après moults démarches administratives, a réussi à implanter une unité médicale à Mohammedia destinée à apporter un nouveau modèle de soins, notamment pour les plus défavorisés.
A côté du dispositif de la charte de l’investissement et de Tamwilcom, les banques marocaines proposent elles aussi des produits spécifiques et courtisent de plus en plus de MDM par des actions au sein des pays d’implantation. Objectif majeur : accroître leur niveau d’investissement au Maroc et contribuer à créer de la richesse.
Il ne s’agit donc plus de capter les transferts et de les garder dans des comptes bancaires. L’ambition actuelle est de permettre le mouvement d’une partie de ces transferts en investissements. Les secteurs porteurs sont multiples. L’énergie et le tourisme sont souvent cités mais ils ne sont pas les seuls à offrir des opportunités.
Le pari est ambitieux mais est en passe d’être relevé.
A propos des transferts MRE
Le montant des recettes MRE a atteint plus 117 milliards de dirhams à fin 2024. Ces transferts ont par ailleurs déjoué les pronostics en résistant remarquablement aux effets économiques de la pandémie. A l’inverse de la tendance mondiale, les transferts effectués par les MDM vers le Royaume affichent ainsi une hausse de plus de 72% depuis 2020. La résilience dont ont fait preuve les transferts MRE pendant et après le Covid est exceptionnelle et grandement saluée. Les acteurs marocains ont pour objectif d’agir pour qu’une partie de ces transferts soit dédiée à l’investissement.
Rachid El Oufir