France : La tomate de la discorde
La tomate marocaine se trouve au centre de querrelles entre exportateurs marocains et agriculteurs français qui ont exprimé avec violence leur mécontentement à l’écoulement de la production marocaine sur le marché français.
Des vidéos d’agriculteurs pointant du doigt les tomates d’origine marocaine moins chères vendues dans les hypermarchés français devenues quasiment virales sur les réseaux sociaux, des articles de presse virulents où ceux-là même fustigent ces mêmes exportateurs : la tomate marocaine est au centre de discordes.
Dans une vidéo très largement relayée sur la toile, un agriculteur français, barquette de cerises marocaines « vendues à moins d’un euro, un prix défiant toute concurrence » explique au journaliste pourquoi les agriculteurs français ne peuvent en aucun cas faire moins cher.
« Le Maroc est un pays où le coût de la main-d’œuvre est plus bas : un euro de l’heure pour celui qui cueille la tomate contre 14 euros avec les charges en France. Comme le Maroc est signataire d’un accord de libre-échange, il y a 300.000 tonnes de tomates marocaines qui entrent en France chaque année sans aucun droit de douane. On met directement en compétition sans aucun amortisseur le paysan marocain ou le paysan français qui a perdu la bataille avant de la mener », explique-t-il. Le tour est joué, laissant le téléspectateur convaincu que les tomates marocaines que l’on commercialise sur le marché français sont à l’origine des déboires de milliers d’agriculteurs français face à un coût de revient qui ne leur laisse aucun autre choix.
Depuis 2022, le Maroc s’est hissé au rang de principal fournisseur de l’Union européenne, ses exportations étant extrêmement compétitives comparativement à ses concurrents du Sud de l’Europe. Et la France, comme pour d’autres secteurs, reste le principal débouché. Sur les 660.000 tonnes de tomates exportées sur l’Union Européenne, plus de la moitié est destinée au marché français.
Majoritairement cultivées dans la région d’Agadir, représentant 85% de la production nationale de la saison précédente, ces tomates, en particulier les variétés « divisées » à forte valeur ajoutée telles que les tomates cerises rondes et allongées, occupent une place prépondérante sur le marché français, représentant plus de 50% des importations.
Du côté du Maroc, les agriculteurs sont sereins. Les tomates exportées sont régies par l’accord de libre-échange mis en place qui est tout à fait respecté.
L’accord en question a progressivement éliminé les barrières douanières pour les tomates marocaines, les soumettant à des prix d’entrée et à des quotas annuels ne dépassant pas 285 000 tonnes entre octobre et mai. Au-delà de cette période, des taxes sont appliquées.
Toutes ces clauses sont parfaitement respectées et « on ne comprend pas ces déclarations si ce n’est vouloir faire pression sur le gouvernement français pour obtenir plus d’avantages».
Car, selon des exportateurs nationaux, le stock de tomates marocaines commercialisé ne couvre que 8% des besoins européens.
Rachid Elaoufir