L’enquête sur ce qu’il est désormais appelé « l’affaire Bab Darna » est en cours. Mais plusieurs failles sont déjà flagrantes et plusieurs questions restent en suspens : publicitaires, autorités, banquiers, acquéreurs… et El Ouardi bien entendu.
A qui incombe la responsabilité de la grande escroquerie de ce qu’il est désormais appelé « l’affaire Bab Darna » ? On parle de 800 personnes dont 200 MRE.
Au total, il s’agirait de 200 millions de dirhams que le promoteur, dénommé El Ouardi Sidi Mohamed, aurait volatilisé et aurait décidé de prendre la poudre d’escampette.C’est en tout cas ce que rapporte la presse avec des témoignages de supposés acquéreurs arnaqués.
Ces derniers affirment tous qu’ils se sont basés, pour leur achat, les publicités qui passaient à la télévision nationale, la majorité d’entre eux estimant que la simple affiche publicitaire était un gage de la fiabilité du projet.
Question 1: une agence de communication à qui est confié la production d’un spot publicitaire sur un produit (des logements dans ce cas de figure), a-t-elle une part de responsabilité ?
Deux avis divergent. « L’agence n’a pas de responsabilité tant que le message véhiculé ne porte pas atteinte aux mœurs », explique un publicitaire. Autrement dit, dans le cas de Bab darna, elle n’a aucune responsabilité. Oui…mais pas que…tout de même.
L’autre avis, contraire au premier, est plus convaincant. Contacté par nos soins, un publicitaire explique que « il y a un minimum de vérification quant à la solvabilité du client qui se présente, ne fût-ce que pour savoir s’il est solvable ou pas car l’agence doit d’abord être assurée d’être rémunérée dans sa prestation ». Partant de là, « une agence sérieuse mène en premier lieu une enquête de moralité de son client. Une fois cette enquête menée, s’il s’agit d’une production audiovisuelle, l’équipe de l’agence se rend sur place pour avoir une idée concrète du produit que le client souhaite commercialiser ».
Du coup, l’agence qui a produit le spot télévisé a une part de responsabilité dans le mensonge si l’on croit l’hypothèse avancée de la non-existence des projets en question.
Question 2 : El Ouardi ne serait pas, selon plusieurs témoignages, propriétaire des terrains qu’il disait vouloir construire ultérieurement. Le promoteur mettait en place des affiches à côté des dits terrains pour tromper les acquéreurs. A supposer que cela était vrai, où étaient donc les représentants des autorités à commencer par le Moqadem et le caïd?
Question 3 : Les contrats existants parlent de vente en VEFA. Ce type de vente suppose que le client dispose d’argent cash ou passe par la banque.
Si le client contracte un crédit, il est impossible que la vente se fasse en VEFA dans ce cas de figure car la banque du client exige la caution de la banque du promoteur ainsi que le déblocage, lors du dernier versement, des titres fonciers. Si le terrain n’est pas la propriété du promoteur, sa banque ne peut pas donner de caution sur le terrain puisqu’il ne lui appartient pas.
Cela suppose donc qu’aucun des 800 acquéreurs dont parle la presse n’a eu recours au crédit bancaire. 800 acquéreurs, tous disposant de cash : cela semble invraisemblable. Comment expliquer que 800 acquéreurs dont 200 MRE traitent tous avec du cash ?
Question4 : Qu’en pensaient les commerciaux chargés de vendre ? Aucun d’entre eux ne s’est posé la question de savoir si les terrains étaient bel et bien la propriété d’El Ouardi ? Aucun d’entre eux n’a pensé à dénoncer de tels mensonges ?
Question 4 : Des prix trop bas par rapport au prix du marché.
Les prix proposés par le promoteur étaient beaucoup trop bas par rapport à ceux du marché. « Des villas à 5000 DH le m2 », nous explique un banquier de la place « cela devait inciter à se poser des questions. Comment ce promoteur arrive-t-il à vendre aussi bas ».
Question 5 : Et la responsabilité de la Fédération Nationale des Promoteurs Immobiliers ?
Quelle est sa responsabilité, au moins dans la dénonciation d’escroquerie à grande échelle ? Contacté par nos soins, le président reste injoignable depuis plusieurs jours.Toutes ces questions laissent planer de nombreux doutes sur cette affaire. L’enquête est actuellement en cours.
Amale DAOUD